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		 Stances 
		Imprudente 
		Divinité, Injuste et fâcheuse chimère, Dont le pouvoir imaginaire 
		Tourmente une jeune beauté. Amour, que ton trait est nuisible, Et 
		que tu parois insensible À tant de plaintes et de vœux ! Alors 
		qu’Amarante soupire, Thyrsis est exempt de tes feux Et ne connoît 
		point ton empire.
  Tandis que ses yeux innocens Enchantent le 
		cœur d’Amarante, 
		Et que cette flâme naissante 
		A déjà des effets puissans, 
		Cette belle par une œillade 
		Montre qu’elle a l’esprit malade, 
		Et qu’elle chérit sa langueur. 
		Mais ta rigueur inconcevable 
		Rend cet adorable vainqueur 
		Autant insensible qu’aimable. 
		 La grâce qu’on voit 
		en son port, 
		Et sa douceur incomparable. 
		Est un écueil inévitable 
		Où sa raison perd son effort. 
		Son ardeur, qui toujours augmente, 
		Devient enfin si véhémente 
		Qu’elle ne la peut plus cacher : 
		Chacun de nous la voit paroître. 
		Et le seul qu’elle veut toucher 
		Seul ne sçait pas la reconnoître. 
		 Peut-être, s’il 
		sçavoit un jour 
		L’ardeur de cette belle flâme, 
		La pitié feroit en son âme 
		Ce que n’a jamais pû l’amour. 
		Mais tant de soûpirs qu’elle pousse. 
		Par une voix plaintive et douce, 
		Ne découvrent point ses désirs ; 
		Son Thyrsis n’y peut rien comprendre, 
		Et ne pousse point de soupirs, 
		Puisqu’il ne les sçait point entendre. 
		 Jeune et capricieux 
		enfant, Que tu 
		te vas donner de blâme ! 
		Pour avoir pu vaincre une femme, 
		Crois-tu te voir plus triomphant ? 
		Non, non ; mais par cette injustice 
		Tu montres bien que ta malice 
		Est jointe avec peu de pouvoir : 
		Si la force suivoit tes armes, 
		Thyrsis pourroit s’en émouvoir, 
		Ou du moins connoître tes charmes. 
		 Et toy, dont j’ay 
		dépeint l’ardeur, 
		Aimable et divine Amarante, 
		Si ton âme n’en est contente, 
		Il faut en blâmer ma froideur ; 
		Si ce qui te rend insensée 
		Pouvoit échauffer ma pensée, 
		J’y travaillerois plus 
		d’un jour ; Mais je suis exempte de blâme, 
		
		
		Puisqu’il faut avoir 
		de l’amour Pour mieux discourir de ta flâme. 
		  
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